La responsabilité du géomètre-expert en cas de méconnaissance des règles d’urbanisme

Urbanisme

Dans un arrêt du 4 avril 2024, la Cour de cassation a rappelé que la responsabilité du géomètre-expert devait être appréciée en considération des dispositions en vigueur à la date de son intervention, et que leur méconnaissance constituait une faute, peu important que les dispositions méconnues aient par la suite été annulées par le Juge administratif.

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Le contexte

Dans cette affaire, un géomètre-expert s’est vu confier une mission incluant le dépôt d’une demande de permis d’aménager un lotissement, ainsi que la maîtrise d’œuvre de la voirie et des réseaux divers (VRD) jusqu’à la réception des ouvrages.

Le géomètre-expert était tenu, contractuellement, de concevoir un projet qui “épuise au maximum les dispositions d’urbanisme applicables à chacune des parcelles créées”.

Mais il n’a pas fait application du plan d’occupation des sols (POS) alors en vigueur, en considérant que ses dispositions étaient entachées d’illégalité.

Le lotisseur ne parvenant pas à commercialiser les lots en raison d’une modalité de calcul défavorable ainsi retenue par le géomètre-expert, au regard des règles existantes alors pour déterminer l’emprise au sol maximale des constructions, il a procédé à la résiliation du contrat de maîtrise d’œuvre et sollicité le concours d’un autre géomètre expert, afin d’obtenir un permis d’aménager modificatif avec des surfaces d’emprise au sol augmentées. 

Le géomètre-expert a assigné le maître d’ouvrage en paiement de ses honoraires, et celui-ci a formé contre ce dernier une demande reconventionnelle en réparation de son préjudice.

Le litige s’est poursuivi jusqu’en cassation.

L’apport de l’arrêt du 4 avril 2024

Les juges de cassation ont considéré que la faute du géomètre-expert devait s’apprécier à la date d’exécution de sa mission, l’effet rétroactif de l’annulation ultérieure du document d’urbanisme devant être sans incidence sur cette appréciation :

La faute du géomètre-expert s'appréciant à la date de l'exécution de sa mission, l'effet rétroactif de l'annulation ultérieure d'un règlement d'urbanisme est sans incidence sur cette appréciation. Par ailleurs, le principe selon lequel il incombe à l'autorité administrative de ne pas appliquer un règlement illégal ne permet pas au professionnel, chargé contractuellement d'établir un projet exploitant au maximum les possibilités offertes par les règles locales d'urbanisme, de se fonder, sans l'accord de son cocontractant, sur d'autres règles que celles en vigueur au moment de l'exécution du contrat.

Il en découle qu’à l’inverse, la responsabilité du géomètre-expert ne peut pas être recherchée pour n’avoir pas anticipé l’illégalité d’un règlement d’urbanisme, dont il aurait fait application et qui aurait été ultérieurement annulé (ce qui ne l’exonère pour autant pas de son obligation contractuelle de conseil et d’information).

Références :

Cass. Civ. 3ème, 4 avril 2024, n°22-18.509

Avec le concours de Louise BARBARIN, étudiante à la Faculté de droit de l’ICES